Anecdotes du quartier des 36 rues

Vue historique sur une des rues du vieux quartier de Hanoï

Temps de lecture : 5 minutes

Le quartier des 36 rues est le cœur authentique de la capitale du Vietnam. Au-delà de son ambiance atypique, de ses façades hétéroclites et de ses va et vient incessants, voici quelques anecdotes historiques et culturelles qui ont profondément forgé le caractère unique de ce quartier-village.

Ces anecdotes sont à retrouver de manière plus complètes dans le livret « Découverte du vieux-Hanoï », éditions The Gioi, 2012. À lire avant tout voyage au Vietnam.

Des anecdotes historiques

Hanoï est la seule ville, avec Hoi An, à avoir pu conserver un centre urbain ancien au Vietnam. Le vieux-quartier constitue en effet, le noyau de la partie « marchande » de la capitale millénaire « Thang Long ».

Le vieux-quartier d’aujourd’hui s’est développé en tant que quartier marchand de la cité impériale de Thang Long, ancien nom d’Hanoï. De nombreux habitants avaient quitté leurs villages d’origine pour venir aux portes de la cité impériale afin d’installer un « pignon sur rue ». C’est ce mouvement de migration qui a forgé la constitution de différents groupes de villageois tous issus des villages du delta du fleuve Rouge, en corporations. Au fil des siècles, ils ont donné naissance à un véritable centre urbain, tout en gardant l’interaction et la production artisanale de leurs villages d’origines.

Le quartier des 36 rues tient son nom d’un livre « Vu Trung Tuy But » de Pham Dinh Ho (1768-1839) paru à la fin du 18ème siècle. A cette époque, le vieux-quartier était divisé en 36 corporations. Durant la dynastie des Tran (1225-1400), on avait compté près de 61 corporations. De nos jours, la plupart des rues ont conservé leur nom d’antan, mais nombreuses ont aussi renouvelé leurs activités ou ont abandonné leur activité d’origine.

Vue en hauteur ancienne du quartier des 36 rues et corporations. La ville d’autrefois ressemble à ce qui a été conservé en état à Hoi An.

Des anecdotes architecturales et liées au foncier

La plupart des maisons du vieux-quartier de Hanoï datent du 19ème et du début du 20ème siècle. C’est parce que avant ces dates, les maisons étaient en bambou, en bois et en terre battue. Face à l’épreuve du temps et au climat du Vietnam, ces maisons n’ont bien entendu pas pu résister. Les plus anciens bâtiments sont les maisons communales ainsi que les pagodes.

Les maisons anciennes comportant un étage ont la particularité de conserver de toutes petites fenêtres ou elles en sont complètement dépourvues. Cette caractéristique est liée au fait, que lors des passages des convois royaux, les habitants n’étaient pas autorisés à regarder directement le visage du roi.

Le prix du mètre carré du vieux-quartier est le plus élevé du Vietnam, il atteint par endroit près de 50 000 USD, soit 44 000 euros. La cherté du terrain se combine à l’une des plus grandes densités au monde. On dénombre en effet, près de 84 000 habitants par km²… ainsi les espaces de vie sont très restreints dans les habitations, mais cette contrainte a résultée d’une force incroyable d’entraide entre les habitants.

Une photo de 1884 de M. Hocquard au niveau de l’actuelle Cua Dong, la porte de l’Est, montre la présence de quelques structures en bois et en bambou.

Des anecdotes liées à l’activité commerciale

Près de la moitié des habitants du vieux-quartier sont des commerçants. Des marchands qui ont tendance à se regrouper dans une seule même rue, tout à fait absurde pour un visiteur étranger qui y verrait tout de suite une forme de concurrence impossible. Hors au Vietnam, la tradition commerciale, veut que l’on soit « amis » entre commerçants et que l’on fasse partie d’une même « corporation » quand on est vendeur.

Autre particularité liée à cette fonction marchande, les noms des rues commencent tous par l’appellation « phố » (à ne pas confondre avec la soupe phở) qui signifie à la base « lieu de vente/magasin ». Mais les magasins qui se sont regroupés par corporation, se sont installés en rangées le long d’une même rue. C’est alors que l’appellation « phố » s’est élargie à toute une série de magasins pour donner aujourd’hui le sens de « rue ». Dans le véritable cœur c’est l’appellation « hàng » qui a subsistée, elle veut dire rayon d’un magasin.

Les rues Hàng Bạc (rue de l’argent) et de Hàng Thiếc (rue de l’étain) sont les seules rues du vieux-quartier qui ont pu conserver depuis le 15ème siècle, leurs activités traditionnelles. A une date moins antérieure, quatre autres rues ont conservées leurs activités traditionnelles : la rue Hàng Mã (rue des papiers votifs), Hàng Đồng (rue du bronze), Hàng Mành (rue des rideaux) et Hàng Chiếu (rue des nattes).

Marchands de ferblantiers dans la rue Hàng Bạc (rue de l’argent).

Quelques anecdotes sur quelques rues

  • Hoàn Kiếm : la plus courte, elle n’est longue que de 52m.
  • Cầu Gỗ (rue du pont de bois) : elle porte le nom d’un ancien pont en bois qui traversait un ancien cours d’eau reliant le lac Hoan Kiem et le lac Hang Dao, qui fut remblayé par les français.
  • Hàng Bè (rue des radeaux) : elle porte ce nom car cette rue était autrefois bordée par le fleuve Rouge. Les radeaux transportant du bambou avaient leur port d’attache et ont permis d’alimenter un marché appellé… Hàng Bè, le marché des radeaux. Même histoire pour la rue Hàng Tre, la rue des magasins de bambou, pas loin.

La rue Hàng Tre (rue des bambous) qui donnait autrefois sur le fleuve Rouge.

  • Hàng Đường (rue du sucre) : c’est certainement la plus vieille rue du quartier.
  • Hàng Giầy (rue des cordonniers) : la rue la plus étroite, large seulement de 5m.
  • Hàng Khoai & Hàng Dầu : les seules rues portant le nom de légumes : la pomme de terre et les haricots.
  • Gầm Cầu (rue sous le pont) : elle porte ce nom car elle se trouve au-dessous d’un viaduc ferroviaire, en partance de la gare d’Hanoï et en direction du pont Long Bien.
  • Hàng Bông (rue du coton) : la plus longue, 932m.
  • Cửa Đông, Cửa Bắc et Cửa Nam: elles portent le nom des anciennes portes de la cité impériale, qui était de forme carrée.

La rue Cửa Đông (rue de la porte de l’Est)

  • Lãn Ông: la plupart des habitants de cette rue descendent de chinois du Fuzhou installés dès le 15ème siècle. La rue s’est spécialisée depuis dans la médecine traditionnelle chinoise, puis vietnamienne. En hommage, le nom donné à la rue est celui de Lan Ong (1720-1791), grand connaisseur de la médecine orientale. Même histoire pour la rue Thuốc Bắc (rue de la médecine du Nord).

Découverte du cœur d’Hanoï d’aujourd’hui

Nous vous proposons une immersion “Hanoi comme un local” afin de découvrir cette histoire, l’ambiance particulière de ce quartier, ainsi que la rencontre avec quelques uns de ses habitants. Entre pagodes, le lac de l’Epée restituée et les ruelles secrètes, plongez dans l’âme de ce quartier historique.

Hanoï comme un local

Alexandre Dang: Je m'appelle Alexandre, je suis originaire de Lyon, mais Hanoï est devenue ma seconde maison. La vie frénétique, l'histoire et les contrastes de cette grande dame me passionnent. Au gré de mes pérégrinations urbaines, j'essaie de vous transmettre via une écriture modeste, l'âme de Hanoï. Profitez de ce blog entièrement francophone et intégralement dédié à l'une des capitales les plus envoûtantes d'Asie.

Voir les commentaires (6)

  • Merci pour ces vues passionnantes sur l'Hanoi d'antant.....j'habite le sud de la France et nous avons eu la chance de sejourn'er 2 fois dans cette ville que nous adorons.....en effet notre dernière fille Jade est Hmong et pour ses 18 ans ,nous l'avons ramenée dans son pays en sillonnant le Tonkin jusqu'à Sapa ,en passant par Hanoi et la baie d-'Halong, ..Nihn binh.. ..et même Dien Bien Phu.....

    • Bonjour Elisabeth,

      Un grand merci pour votre retour, ainsi que le partage de votre histoire familiale.
      Continuez à nous lire ! :)

      L'équipe d'Hanoi oi, blog d'Amica Travel.

  • Super intéressant..si vous passez sur Saigon..venez faire une conferece un article dans notre revue Echo des Rizières.

    Joseph President AFV afvsaigon.org

    • Bonjour Joseph,

      Merci beaucoup pour cette proposition ! On vous contactera si nous sommes de passage à Saigon.

      Belle fin de semaine à vous

      L’équipe d’Hanoi oi, blog d’Amica Travel.

  • Ma famille vivait dans le vieux quartier d'Hanoi et mon arrière-grand-père était un commerçant au temps de la colonisation française. Il possédait plusieurs maisons et notamment 3 épiceries dans ce quartier. Il vendait des produits locaux et également des produits français comme le vin et le fromage pour les soldats... Je suis à la recherche de bénévoles pour faire revivre son histoire.

    • Bonjour Nicolas,

      Merci à vous de nous avoir fait partager votre récit. Faire revivre cette histoire peut-être une belle idée de revivre le vieux quartier d'antan : un défilé ? Une reconstitution ? A discuter.

      Belle fin de semaine à vous

      L’équipe Hanoi oi, blog d’Amica Travel.