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L'Histoire & la culture de Hanoi

Le massacre des rats de Hanoï en 1902

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Temps de lecture : 4 minutes

Voici une histoire méconnue, presque taboue de l’époque de la colonisation française en Indochine. Entre ruse des locaux et idéologie hygiéniste des français, le massacre des rats à Hanoï en 1902 est l’un des épisodes les plus anecdotiques et insolites de l’histoire de la capitale vietnamienne.

Hanoï, capitale de l’Indochine française

La cité entre les fleuves devient en 1902 la nouvelle capitale de l’Indochine française et le sera jusqu’en 1945. A l’époque Paul Doumer est gouverneur général depuis 1897. Lorsqu’il arrive à Hanoï, il lance plusieurs grands projets d’infrastructures, comme le pont Paul Doumer, aujourd’hui pont Long Bien et le grand palais de l’exposition universelle de 1902-1903. Il fait de Hanoï une vitrine de la mission civilisatrice de la France en Indochine et dote la ville, du tout premier réseau électrique d’Asie.

L’héritage est aujourd’hui important dans la trame urbaine de la cité : ses vieilles façades, ses bâtiments et les avenues se croisant à angle droit, sont un héritage direct de la politique de Paul Doumer.
Ce dernier est aussi à l’origine de l’installation des toilettes, considérées à l’époque comme un symbole de propreté et donc de civilisation. Mais ces toilettes sont directement impliquées dans une histoire insolite et moins connue de Hanoï.

massacre rats hanoï 1902

La rue Paul Bert, aujourd’hui phố Tràng Tiền est le symbole de l’urbanisme à la française de Hanoï

massacre rats hanoï

Le Grand Palais construit pour l’exposition universelle de Hanoï de 1902-1903.

L’origine du massacre des rats

Paul Doumer a doté le quartier français de l’époque d’un véritable réseau d’égouts, afin d’éliminer la saleté et favoriser l’installation des toilettes équipées de chasses d’eau dans les maisons coloniales. Alors que dans la ville « indigène », l’actuel quartier des 36 rues, le réseau était considéré par ce dernier comme « un guère système de drainage ».

Mais le réseau moderne des égouts, long de 14km, est devenu un refuge idéal pour les rats. Ce qui provoqua une préoccupation majeure pour des raisons hygiéniques, bien sûr, mais aussi du lien entre les rats et la peste bubonique (ou peste noire). Par ailleurs, la bactérie responsable de cette maladie ancrée dans la mémoire collective, la Yersinia pestis, fut découverte par le fameux Alexandre Yersin en 1894, soit quelques années auparavant. D’où cette très grande inquiétude qui s’est vite emparée auprès des colons français.

L’administration coloniale mit alors en place le recrutement d’une équipe de travailleurs vietnamiens en tant que chasseurs de rats. On raconte alors qu’ils auraient tué jusqu’à 20 000 rats en une seule journée. Mais les rats étaient toujours présents et l’administration a décidé cette fois, de mettre en place un programme de primes liées au nombre de rats tués, par jour et par chaque chasseur.

Le docteur franco-suisse Alexandre Yersin qui découvrit en 1894 la bacille de la peste. Il est citoyen d’honneur du Vietnam.

La ruse des chasseurs vietnamiens

Pour comptabiliser le nombre de rats tués, l’administration française demande à ses chasseurs de conserver uniquement la queue du rat, car elle ne voulait pas se charger de l’élimination des cadavres des rongeurs.  Et c’est là que la ruse vietnamienne s’est actionnée.
Les chasseurs vietnamiens ne faisaient que couper les queues afin de laisser les rats repartir encore vivants. Dans un but de les laisser se reproduire et donc de continuer à générer des profits ! Certains se sont même mis à élever des rats en les faisant passer pour des rats d’égout…

La fin de l’histoire

Le gouvernement français aboli le programme que plus tard en s’apercevant de la supercherie des chasseurs et des locaux complices de cette ruse particulièrement osée. Malheureusement en 1906, une épidémie de peste bubonique se retourne contre les vietnamiens et provoque 263 morts à travers la ville.

Paul Doumer, l’investigateur de cette politique, était déjà rentré en France. Là-bas, il fut considéré comme le gouverneur général le plus actif de l’Indochine française. Grace à cette glorieuse et lointaine expérience, il accède lentement aux différents échelons du gouvernement français, jusqu’à devenir président de la République française en 1931. Une présidence éphémère puisqu’il fut assassiné en 1932. Il emporta dans sa tombe, l’histoire du massacre des rats de Hanoï et l’une des plus grandes ruses des vietnamiens contre l’occupant français.

Portrait de Paul Doumer, gouverneur général de l’Indochine française et éphémère président de la République française.

Le livre de l’historien Michael Vann

Michael G. Vann est un historien américain spécialisé dans l’histoire des colonies françaises. On retrouve cette histoire insolite dans son livre (en anglais) : “The great Hanoi rat hunt“. Cet article s’est appuyé en partie sur ses sources, afin de proposer au public francophone, le récit de cet épisode historique.

livre hanoi massacre rats

Le livre de l’historien américain “The great Hanoi rat hunt”.

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Alexandre Dang

Je m'appelle Alexandre, je suis originaire de Lyon, mais Hanoï est devenue ma seconde maison. La vie frénétique, l'histoire et les contrastes de cette grande dame me passionnent. Au gré de mes pérégrinations urbaines, j'essaie de vous transmettre via une écriture modeste, l'âme de Hanoï. Profitez de ce blog entièrement francophone et intégralement dédié à l'une des capitales les plus envoûtantes d'Asie.

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6 Comments

  1. franck chandon 26 mars 2019

    Alexandre Yersin est quasi vénéré au Vietnam ainsi que Pasteur. Les rares occidentaux à avoir encore des rues à leurs noms . Leur parcours est passionnant.

    Répondre
  2. Marie-Louise Perrin 28 mars 2019

    J ai apprécié. Très intéressant.
    Je connais peu Hanoï, vivant autrefois à Saïgon.

    Répondre
  3. Kiki Margueritte 30 mars 2019

    Merci

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  4. Cousin 9 juillet 2019

    Merci Alexandre. Article très intéressant. Bon travail!

    Répondre
  5. Python Christian 27 août 2019

    Cher Alexandre, merci. en 2018 j’ai détesté cette ville et je n’attendais qu’une chose le dernier jour mon taxi. En 2019 il y a eu une légère amélioration. Peut être l’emplacement de mon hôtel ou la rencontre d’autres personnes. Nous verrons en 2020. Et peut être que vous allez m’aider….. Merci pour cet article et pour ne pas avoir oublié ce compatriote vénéré Alexandre Yersin de Morges.

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    1. Alexandre Dang 17 septembre 2019

      Bonjour Christian,

      Oui, soit on aime Hanoï, soit on ne l’aime pas. C’est une ville vraiment particulière. Si vous creusez un peu plus vos lectures au sein de ce blog, vous découvrirez que cette ville à une âme et une ambiance à comprendre 😉

      Belle semaine à vous

      L’équipe Hanoi oi, blog d’Amica Travel.

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