Comment ne pas évoquer Hanoï, sans son lac de l’épée restituée (Hồ Hoàn Kiếm ou Hồ Gươm en vietnamien) ? Véritable écrin de verdure, ce lac a été le théâtre d’un événement singulier qui a donné naissance à une légende connue de tous les Vietnamiens.
Nous allons retracer le récit de cette légende, faisant partie des grands mythes de l’histoire vietnamienne et que le peuple vietnamien aime à raconter aux visiteurs de passage.
De quand date la légende ?
La légende du lac de l’épée restituée remonte à plusieurs siècles et plus exactement, à l’époque de la puissante dynastie chinoise des Ming (1368-1644). Le Vietnam du nord était à l’époque, un royaume qu’on nommait “Dai Viet” depuis le XIème siècle. Mais en 1407, le pays fut envahi par les chinois de la dynastie Ming qui en firent une province nommée “Jiaozhi” (Giao Chi en vietnamien).
Le lac Hoàn Kiếm est un ancien bras du fleuve Rouge, il existait déjà à l’époque mais il était connu sous le nom de hồ Lục Thuỷ (Lac des eaux vertes), en raison de sa couleur toujours d’actualité, due à une algue. Les pourtours du lac étaient déjà le lieu favori des Hanoiens et de la cour impériale pour une agréable promenade.
A noter également que Hanoï était nommée à l’époque Thăng Long (La cité du dragon qui s’élève), un nom qui a perduré jusqu’en 1802.
L’origine de la légende
Durant la période d’occupation des Chinois de la dynastie Ming, le peuple vietnamien avait souffert de l’augmentation des impôts et de la famine. La province de Thanh Hóa, au sud de Hanoï fut la première à se soulever, mais les hommes mal armés et affaiblis par la faim, subirent de nombreuses défaites.
C’est à partir d’ici que le contexte appelle à la légende, avec l’intervention divine de Lạc Long Quân, l’empereur du Royaume des eaux, via un pêcheur nommé Le Thanh.
Un matin, en pensant dans un premier temps, qu’il s’agissait d’une bonne prise de poissons, le pêcheur tira des eaux, un filet inhabituellement lourd. Mais il fut rapidement déçu en s’apercevant qu’une barre de fer s’était glissée dans la prise. Il décida de la rejeter dans l’eau. Lors d’un second et d’un troisième lancer, la barre de fer se retrouva encore dans ses filets. En y regardant bien, le pêcheur s’apercevra enfin, qu’il s’agit d’une véritable épée. Le pêcheur décida de rejoindre les troupes du roi Lê Lói pour combattre à ses côtés, en laissant l’épée qu’il l’avait trouvée, chez lui.
C’est lorsque le roi et quelques uns de ses soldats, décidèrent de faire une halte chez le pêcheur, que Lê Lói remarqua cette épée qui brilla presque magnétiquement dans un coin de la maison du pêcheur, qu’il décida de la prendre. Une inscription était gravée dessus : “Par la volonté du ciel”. On raconte que cette épée fut dénuée d’une poignée, qu’on retrouva ensuite, sur un arbre, lors d’une traversée en forêt.
Cette épée décupla l’ardeur et la force des soldats, qui repoussèrent l’envahisseur chinois en 1428. Le roi Lê Lói deviendra Lê Thái Tổ. Il est au Vietnam, considéré comme un héros national, car il repoussa les derniers envahisseurs chinois et a reconstruit le pays.
Et le lac devint celui de l’épée restituée
La paix revenue, le roi Lê Thái Tổ reprit ses occupations habituelles en se promenant sur le lac des eaux vertes. C’est alors qu’une tortue apparût et demanda au roi de redonner l’épée sacrée à Lạc Long Quân, l’empereur du Royaume des eaux : “Sire, la grande cause a été réalisée… Veuillez rendre l’épée sacrée au seigneur des rois…”. Le roi accepta. C’est ce geste symbolique qui a donné son nom au lac des eaux vertes, devenu le lac de l’épée restituée. Derrière le changement de ce nom, une très belle allégorie propre au peuple vietnamien : prendre les armes quand il est vraiment nécessaire. Quelques siècles plus tard, cet acte de résistance renaît durant la guerre d’Indochine, contre l’occupant français, puis lors de la terrible guerre du Vietnam, contre l’assaillant américain.
La tortue du lac de l’épée restituée
C’est à cette légende, que les pourtours du lac rappellent la présence de cet animal commun, devenu mythique. Au centre du lac s’élève la tour de la Tortue (Tháp núi rùa) depuis 1886. Toujours sur le lac, lorsqu’on franchit le fameux pont du soleil levant, tout vêtu de rouge, on accède sur l’îlot Ngọc Sơn (la montagne de Jade), où l’on retrouve une tortue empaillée et conservée depuis les années 1970.
Cette tortue fut la congenère de la toute dernière tortue du lac, âgée de plus de 100 ans, qui a été retrouvée morte en 2016, à cause de la raréfaction de l’oxygène et de la présence des tortues de Floride (qui lui causa des morsures) dans le lac. Cette mort fut très médiatisée et était annoncée comme un mauvais présage par la population locale.
Enfin, la dernière tortue du lac de l’épée restituée appartenait à une espèce très rare en voie d’extinction, la Rafetus Swinhoei. Il s’agit d’une tortue d’eau douce à carapace molle et dont, il en existerait plus que 3 exemplaires dans le monde, dont un à l’état sauvage dans un lac du nord du Vietnam, mais dont la localisation exacte est gardée secrète pour la protéger.
La fin de la légende est donc triste, mais l’imaginaire populaire est plus que vivace chez les Vietnamiens et plus particulièrement chez les Hanoiens. L’épée sacrée dort toujours au fond des eaux, gardée par le génie de la tortue et surmontée par un magnifique écrin de verdure.
“Lac de l’épée, corbeille de fleurs au cœur de la cité, autour de laquelle flotte un ruban de soie, le fleuve Rouge.” Menelaos Ludemis, poète grec.
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Merci
Au cours d'un voyage souvenir (j'ai vécu à Bien hoa (près de Saïgon), j'ai visité Hanoï et le lac de l'épée restituée et j'ai gardé une très bon souvenir de cette ville, plus vrai que la capitale du sud.
Bonjour Jean-Marie,
Oui Hanoï possède plus de charme et d'histoire que Saïgon.
Bonne semaine à vous !
L’équipe Hanoi oi, blog d’Amica Travel.
Merci, je redige les commentaires de prises de vues que j'ai rapportées en novembre 2022 de mon 5ème voyage au Vietnam, mon pays cœur, ma terre, mon chez moi ... Je vis à La Rochelle, je vis aussi dans le souvenir constant de ma ville : Hanoï.
Je ne peux que comprendre votre attachement à ce bout du monde. Le Viêtnam me manque des que je le quitte ... je voyage seule depuis longtemps. Sophie.